Les fantômes d’Ismaël d’Arnaud Desplechin. Ismaël (Mathieu Amalric), réalisateur talentueux, essaie de finir son dernier opus, sorte de biopic sur son frère, Yvan Dédalus (Louis Garrel), curieux diplomate qui enchaîne les missions dans les régions les plus troubles du globe. D’où l’amorce insolite, en mode « film d’espionnage » ( j’ai cru un instant que je m’étais trompée de salle…).
A ses côtés, Sylvia (Charlotte Gainsbourg) qui partage sa vie depuis deux ans. Car Ismäel est considéré comme veuf : sa femme, Carlotta, est partie il y a vingt ans.
Soudain, Carlotta (Marion Cotillard) réapparait, troublante, bien névrosée, décidée à récupérer son mari. Sylvia, elle, plus saine, ancrée dans le réel, dit ses émotions, la tristesse, la colère, la peur et finit par s’en aller.
De Hitchcock à Joyce
Desplechin bourre son film ou plutôt ses films (tant il y a de films dans le films) de références cinéphiles et littéraires (Vertigo d’Hitchcock, Ulysse de Joyce…) et d’auto-références (clin d’œil à sa filmographie) à l’instar de son (anti) héros qui se bourre, lui, de médocs. D’ailleurs, les histoires se télescopent comme dans sa tête épousant les méandres de sa psyché (et de celle du cinéaste, rongé par l’angoisse ?). Les frontières entre réalité et fiction, présentes et passées se brouillent. Et se multiplient aussi les personnages secondaires.
C’est brillant, foisonnant. Un bel exercice de style à appréhender comme une allégorie ? La vie est un dédale (Dédalus), nos existences ne sont linéaires, la frontière entre création et folie ténue. Nous jouons plusieurs personnages, autant de facettes de notre personnalité.
Cependant pour le spectateur non averti ( la bande-annonce est trompeuse), le scénario peut sembler bavard, incompréhensible. Le motif que l’on croyait principal (le trio amoureux) semble se noyer dans ce labyrinthe diégétique. Pas de respiration. Trop de mises en abyme tuent la mise en abyme ?