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Jingle Bells : le présent comme un cadeau

Le présent comme un cadeauBerlin en deuil, le RER en rade, Alep, il n’y a jamais eu autant de réfugiés à faire la manche, des grappes d’enfants frigorifiés.
Dans les Monoprix, boudins blancs, marrons glacés, dindes, saumon, foie gras, champagne, robes à paillettes et cotillons.

Le monde est schizo ? Le père Noël, une ordure ?

Nombreux sont ceux qui redoutent cette période enguirlandée. C’est bien légitime. Les fêtes peuvent renvoyer à la culpabilité devant l’abondance, ou, à l’inverse, au manque, à la solitude exacerbée, à la perte d’un ami, d’un mari, d’un chat, à la peur d’affronter la famille, à revivre des souvenirs, des souffrances passées, à perpétuer des non-dits, à rejouer des rôles. « Je me sens jugé. A 30 ans, j’ai l’impression de devoir justifier mes choix, répondre aux injonctions de mes grands-parents et de mes tantes » avoue Romain. Régression du réveillon. Nostalgie de l’enfance, remords, regrets, traumatismes enkystés. Avez-vous remarqué que, souvent, les personnes « tombent » malades juste avant (la force de l’intention), pendant ou après les « fêtes » ? Des troubles digestifs ? Il y a peut-être quelque chose qu’elles ne digèrent pas, au sens propre mais aussi au sens figuré.

Vous êtes triste, anxieux, déprimé, en colère ? Vous avez droit ! Acceptez votre émotion plutôt que de la nier ou de la combattre. Elle a sa raison d’être. Elle vous parle de vous. « je trouve indécent de voir mes neveux crouler sous les jouets » s’insurge Delphine. Et derrière ce sentiment ? « Je n’ai pas d’enfants, je suis la marginale de la famille et, chaque année, en cette période, j’en souffre » avoue-t-elle. Noël, une belle occasion pour « travailler sur soi », se confronter à ses frustrations et les dépasser !

Me sentir utile, c’est me sentir vivant

Et si vous posiez des actes ? S’envoler à l’autre bout du monde, par exemple, au soleil, ou tout simplement migrer dans un autre quartier, loin des traditions. S’éloigner des proches est un bel oxymore. Une solution plus saine que lexo et dodo. Autre fuite salutaire ? Travailler comme à l’ordinaire. Carole, capitaine de police, divorcée, n’a pas ses enfants le 24. « Je vais bosser toute la nuit. Pour faire contre mauvaise fortune bon cœur, j’ai préparé des animations au « second degré » pour mes collègues, des parodies de Noël. L’humour, c’est mon mécanisme de défense à moi ». Rémi, lui, va aider des sans-abris au sein d’une association caritative. « Me sentir utile, c’est me sentir vivant ».
Le principal ? Trouver comment transformer ces instants convenus en instants qui ont du sens. Le présent comme un cadeau.

Mes ateliers 2018

Hypersensibles, déployez vos ailes ! 17 et 18 mars 2018 à Strasbourg, 8 et 9 avril 2018 à Paris

 

Atelier pas comme les autres pour les hypersensibles, zèbres et compagnie

 

 

L’atelier Pas comme les autres

Hyper cogitateur, hyper atypique, hyper sensible, hyper émotif, hyper réactif, hyper décalé, hyper ….

Mieux se comprendre, mieux s’accepter pour se réaliser pleinement.

Au sein d’un tout petit groupe, confidentiel et cadré, nous vous proposons des pistes de réflexion et des exercices ludiques pour apaiser votre mental, vous aider à reconnaître, comprendre et accepter vos belles différences et à les transformer en atouts.

Peu à peu, vous vous reconnecterez à vos valeurs, votre créativité, vos talents, votre corps, et apprendrez à faire de vos émotions des alliées. En laissant émerger votre être véritable, vous renouerez avec la confiance. L’empathie, l’intuition, la réflexion, la sensation deviendront des forces.

Nous sommes psychopraticiennes certifiées, tisseuses de liens, formées à l’accompagnement des hyper-sensibles et /ou hauts potentiels et autres zèbres.

Nos outils ? Art-thérapie, méditation, respiration, mouvement, communication bienveillante …

Nous nous réjouissons de partager ce week-end avec vous.

Anick et Isabelle

Tarif : 160 euros le week-end (réduction pour les étudiants et demandeurs d’emploi).
Renseignements et inscriptions : Anick 06 63 90 53 79

 

Elles du désir, l’envie de rebondir,  25 mars et 15 avril 2018

femmes débordéesc

L’atelier de développement personnel pour TOUTES les femmes.

Un dimanche par mois de 14h à 19h, à Paris, 5 ème.

Vous vous trouvez jeune et belle ou vieille et « moche », maigre ou grosse, fantaisiste ou rigide, débordée par les « devoirs » familiaux ou célibataire à la recherche du Prince charmant, stressée par le boulot ou sans emploi, imaginative ou « nulle » ?

Offrez-vous une parenthèse de liberté et de créativité

Vos objectifs

Vous confier sans être jugée/lâcher-prise/révéler vos talents/Explorer les multiples facettes de votre personnalité /Gérer vos émotions et le stress/ Renforcer votre confiance en vous/Comprendre vos mécanismes de défense, vos pensées limitantes et les dépasser/ Incarner sa féminité.

Nos méthodes

Parce que le langage corporel, verbal et artistique sont étroitement liés, chaque atelier est composé :

  • d’un temps de parole, d’écoute et d’échange,
  • d’un temps d’art-thérapie : écriture, psychodrame, peinture…
  • d’un temps corporel : danse, méditation, mouvements, sophrologie…

Le groupe permet d’avancer rapidement dans la connaissance de soi. Les autres révèlent nos failles et nos richesses à travers leurs différences et leurs ressemblances. L’expérience de chacune fait écho à notre propre histoire

Je vous propose un espace d’expression confidentiel et cadré et vous accompagnent dans

 

zebres et haut potentiel

Mes patients, pour ainsi dire tous, ont un profil d’hyper-sensible/atypique, voire zèbre ou Haut-Potentiel (surdoué).  Je suis toujours réticente à figer les personnes dans des cases (et en l’occurrence, ces patients-là détestent les cases), coller, d’emblée, des étiquettes. De plus, l’hyper-sensibilité est à la mode. Tarte à la crème de la psychothérapie. Mais une chose est certaine : il est essentiel de valider leur énorme potentiel, les accompagner à reconnaître, accepter et transformer leurs belles différences.

Xavier est mal dans sa peau. Il se sent en décalage dans son entreprise. « Lorsque je peux innover, je m’exalte quelques heures mais dès que la routine reprend le dessus, je m’ennuie terriblement. ». A mes yeux, Xavier n’est pas instable, il a simplement toujours besoin de nouveauté. Sa pensée « décroche » quand ses missions ne sont pas suffisamment complexes. Impossible de se concentrer sur les tâches trop faciles.

 Travailler l’estime de soi

Marie est dyslexique. « Mes difficultés d’apprentissage ont détruit ma confiance en moi et dans le couple». Vulnérable, Marie a été manipulée par son mari  qui lui a fait couper les liens avec son entourage. Les hypersensibles/atypiques sont facilement la proie des pervers narcissiques.  

Albane est une éponge. Dans l’empathie absolue. Deux collègues se disputent ? Alors qu’elle n’est pas concernée, elle se sent prête à tomber dans les pommes. Nous analysons ensemble la « bonne distance » pour qu’elle ne s’identifie pas à des ressentis qui ne sont pas les siens. Elle est d’un perfectionnisme extrême. « Quand mon chef me félicite, j’éprouve un grand sentiment d’imposture. C’est certain, il va finir par s’apercevoir que je ne suis pas à ma place. Je ne mérite pas ce job, je n’ai pas fait d’études ». Albane est sa meilleure ennemie, dans la critique permanente, elle traque les failles, les siennes et celles des autres. On « bosse » sur ses valeurs par des exercices inspirés de la Thérapie d’Acceptation et d’Engagement (ACT). « Plus vous vous rapprocherez de ce qui vous rend réellement heureuse, plus vous trouverez votre vraie personnalité ».

Hélène est  une  écorchée vive, à fleur de peau. En permanence sur le fil. « Je me souviens mot pour mot de toutes les humiliations de mon enfance. Des faits qui sans doute étaient insignifiants pour mes copains de classe et qui pour moi me faisaient verser des torrents de larmes. Une réflexion sur mes cheveux frisés, sur ma timidité maladive, l’indifférence d’un camarade me blessaient terriblement ». Je lui demande de noter quand elle s’estime. C’est dur de parler de soi en positif ! Je l’invite à s’appuyer sur ses ressources dès qu’elle se sous-estime.

 « Je ne suis bien qu’avec les rares personnes qui me ressemblent »

Claire se décrit trop fragile. En souffrance. Cela l’empêche de rentrer en relation avec les autres. Elle fuit les groupes, refuse des invitations et du coup, se sent seule et incomprise. Peur de trop ressentir ? « Je ne suis bien qu’avec les rares personnes qui me ressemblent. Il n’y a que les vrais liens qui me nourrissent, parler de la pluie et du beau m’exaspère». Au fil des rendez-vous, des actings en somato-thérapie et Gestalt l’incitent à se reconnecter à son schéma corporel, à ses blessures  bien engrammées dans la cuirasse musculaire. Elle s’entraîne à reconnaître aussi la couleur et les nuances de la peur, de la colère, de la joie, de la honte, de la tristesse pour mieux lâcher prise. Je plaisante (en moitié) : « Sortez de votre carapace, cassez votre armure. Elle a été nécessaire pour vous protéger dans l’enfance mais elle ne l’est peut-être plus aujourd’hui ». Faire de ses émotions des alliées, comprendre à quels besoins elles correspondent s’apprend également.

« J’ai mille idées à la seconde. Cela me fatigue, me déprime »

Stéphane, hyper-émotif, écrit des chansons. Je m’emploie à lui faire prendre conscience de ses talents hors du commun. Etre hypersensible/atypique, c’est être créatif. C’est le bon revers de la médaille, non ? Il me confie sa scolarité défaillante : « J’étais nul en classe, le bon à rien et le bouc émissaire de toute l’école ». Je ne lâche rien : « Vos aptitudes n’ont sans doute pas été détectées ou votre environnement les a niées mais ce n’est pas trop tard ! » Beaucoup d’hyper-sensibles/atypiques ne respectaient pas le cadre scolaire. Leurs réflexions « trop » originales, fouillées, fantaisistes, voire provocatrices, déstabilisaient leurs professeurs et leurs parents.

Solenne est curieuse de tout, pige très vite, rassemble des infos sans les ordonner. Elle a du mal à choisir entre plusieurs solutions, procrastine. Fonctionne par fulgurances. Pourquoi ? Parce que probablement, son intelligence n’est pas linéaire mais en arborescence. 

Elle  a l’oreille fine, un simple bruit devient un vacarme. Impossible de se concentrer dans l’open-space !  Elle réagit à tous les stimuli : l’étiquette d’un vêtement qui frotte contre sa peau, une forte lumière… Tous ses sens sont exacerbés.

Un besoin de justice hors du commun anime Sophie.  Sauver est sa raison d’être. On travaille sur le classique triangle « sauveur, bourreau, victime ». En discutant, je lui glisse que ses enfants, jugés hyper-actifs, semblent avoir des facilités, même si, très affectifs, ils ont besoin du regard aimant et valorisant de leurs profs pour réussir.

 « Je suis un handicapé du langage »

Rémi, volubile, très fin dans ses raisonnements, affirme « je bégaie à l’intérieur de moi. Je suis un handicapé du langage ». Le cerveau de l’hyper-sensible/atypique intégrerait toutes les informations sans les trier. La parole a du mal à suivre le haut débit des images mentales et des associations d’idées débordantes. Rémi est considéré comme puéril par son entourage. Nous évoquons l’intelligence émotionnelle. Par des méditations sur « l’enfant intérieur », en particulier, il se réconcilie peu à peu avec ses ressentis passés. Il est particulièrement intuitif et je l’invite à creuser cette qualité.

« J’ai mille idées à la seconde. Cela me fatigue, me déprime, je suis irritable, je me demande si je ne suis pas bipolaire » se plaint Frédérique. Effectivement, l’hyper-sensible/atypique a des perceptions intenses, des réactions extrêmes, une pensée complexe, systémique. Et ils cultivent les paradoxes. Par exemple, malgré leur manque de confiance, ils peuvent avoir « réponse à tout » ce qui exaspère l’entourage et donc les marginalise.

Comme chez les surdoués, le nombre des connexions neuronales serait plus élevé et plus rapide que chez les gens « normaux ». « Vous êtes probablement en capacité d’analyser et de synthétiser un grand nombre de données en même temps. C’est épuisant en effet ! ».

Mais d’ailleurs, les hyper-sensibles/atypiques sont-ils surdoués/zèbres ?

Tous les surdoués sont hypersensibles mais pas forcément atypiques : ils peuvent être dans le moule, bien dans leurs baskets. Lorsqu’ils sont surdoués et atypiques,  le terme de « zèbre » inventé par Jeanne Siaud-Facchin est bien approprié. C’est une belle métaphore : le zèbre n’est-il pas le seul animal sauvage que l’homme n’a pas pu domestiquer ? Ses rayures lui permettent de se dissimuler et chacun, cependant, se distingue par un pelage unique.

Les hypersensibles/atypiques ne sont pas forcément surdoués, c’est-à-dire n’ont pas nécessairement un QI aux alentours de 135. Peu importe ! Non seulement ils partagent pratiquement les mêmes caractéristiques, mais en plus, les protocoles pour les accompagner sont les mêmes.

La douance est validée 

 A mes patients hyper-sensibles/atypiques et potentiellement « zèbres », je conseille de lire les classiques : Alice Miller, Christel Petitcollin, Jeanne Siaud-Facchin, Elaine Aron, Cécile Bost, Nicolas Gauvrit, Saverio Tomasella, Valérie Foussier, Monique de kermadec, Raymonde Hazan, Nadine Kirchgessner… lorsqu’ils se reconnaissent,  L’image qu’ils ont d’eux – même change radicalement. Leur vie aussi, du coup. La légitimité est salvatrice.

Ceux qui le souhaitent vraiment peuvent passer un  test avec un psychologue habilité. (Là encore, la vigilance s’impose ! ) pour en « avoir le cœur net ». La douance est très souvent validée et les patients soulagés : Il existe une explication plausible à leurs troubles. Mais il est difficile de franchir le pas. N’est-ce pas prétentieux de s’auto-soupçonner surdoué ? (L’hyper-sensible/atypique, lucide sur tout ce qu’il ne sait pas, est en général modeste)…Attention, prendre en compte  seuelment le QI est réducteur. On peut avoir une intelligence moyenne dans un domaine et supérieure dans un autre. Le  bon test est celui qui permet de déterminer les points forts de chacun et considère toutes les intelligences. 

Notes :

Les prénoms de mes patients ont été changés. Mais ils se reconnaîtront ici ou là…

Articles à venir :

  • Le zèbre en entreprise
  • Zébritude et résilience
  • Tout le monde est zèbre à la naissance ?

Fiche N°2 : être acteur de sa vie

être acteur de sa vieSouvent, nous avons l’impression de subir ce qui nous arrive, d’être impuissant. Nous prenons alors une posture de victime. Déjà, les stoïciens, et ensuite Schopenhauer, croyaient en une sorte de force aveugle. Un peu comme la pulsion freudienne qui nous empêche de décider de notre sort (le schicksal/destin).
Ce genre de croyances peut prendre sa source dans les générations antérieures. Nous identifions une événement présent en lien avec le passé « les femmes me quittent toujours et d’ailleurs ma mère a quitté mon père ».
Une croyance peut, à un moment donné être nécessaire, nous aider à traverser des épreuves. Mais il ne faut pas qu’elle devienne une répétition inhibitrice.
Le nourrisson pressent que sa survie va reposer sur sa capacité à satisfaire le désir de ses parents. Ensuite, l’enfant, l’ado et l’adulte vont répéter cette croyance : je dois satisfaire mes proches, mes patrons, mes amis, sinon, je ne serai plus aimé.

Jouer la victime, se faire plaindre, se déresponsabiliser peut permettre paradoxalement de prendre le pouvoir sur ses proches. Certains éprouvent même une certaine satisfaction à se tromper, perdre, être infantilisé, régresser dans la position de l’enfant impuissant face à son bourreau.
Prendre ses responsabilités, savoir dire non, est angoissant, cela induit de prendre le risque de déplaire et de se confronter à ses propres limites.
Certains, tombent dans un autre excès : l’hyper contrôle. N’avez-vous pas rencontré des personnes qui planifiaient leur vie au quart d’heure près ? Aucune place pour l’imprévu, la fantaisie. Si nous désirons reprendre les rênes de notre vie, nous devons accepter de ne pas tout contrôler. Pas si simple.

Voici 5 étapes à considérer pour identifier ce qui nous freine et se donner les moyens d’y remédier

Se distancier émotionnellement en changeant de temporalité. Si j’étais en train de mourir et que je me retournais sur ma vie, quelles décisions prises jusqu’à aujourd’hui me sembleraient pertinentes ? Regrettables ? Il est primordial de cerner ses erreurs et ses réussites. Quelles « leçons » pouvez-vous en tirer ? Comment remédier à ses erreurs et se féliciter de ses réussites ?

Ecouter ses voix intérieures. L’une, personnelle, exprime nos besoins et nos désirs authentiques (notre soi). L’autre exprime les besoins et les désirs que les autres (la famille, la société) ont imaginé pour nous (la persona), elle est parfois un véritable dictateur ou saboteur interne. Laquelle des deux privilégions-nous ? Nos envies sont-elles freinées systématiquement par la voix critique ou sommes-nous ne capacité d’écouter aussi celle du désir ?

Faire face à l’imprévu. L’imprévu est toujours déstabilisant. Les anxieux auront tendance à tout sur contrôler et, du coup, à se fermer aux opportunités. Les fatalistes ou les inhibés, n’arriveront pas à choisir la direction. Prendre sa vie en main suppose que nous gardions le contrôle mais en harmonie avec nos valeurs et nos objectifs.

S’affirmer. Exprimer ses valeurs, ses besoins, ses désirs, ses envies, ses élans sans céder à la pression et à l’agressivité est l’idéal: c’est la juste affirmation de soi. Elle permet de choisir en adulte responsable. Eviter l’affirmation agressive : exprimer ses besoins c’est prendre aussi en compte les besoins des autres. Eviter également l’affirmation passive : je n’exprime pas clairement mes besoins et je reproche aux autres de choisir à ma place.

Accepter les compromis. Etes-vous capable de prendre l’autre en compte ou bien passez-vous en force, en solitaire, dans l’égoïsme ? Accepter le compromis, c’est exprimer clairement ses besoins mais aussi être empathique : comprendre et accueillir les besoins des autres.

Amour

Amour et le mal de pierre
Le mal de pierre, de Nicole Garcia. On croirait une adaptation d’une œuvre de Flaubert ou Maupassant. Il faut dire que la merveilleuse et sensible Nicole Garcia est très classique tant le choix de ses thèmes que dans leurs traitements. Tiré du roman Mal di pietre de Milena Agus, ce film romanesque et fantastique, tout en flashback, n’en demeure pas moins touchant.

Gabrielle (Marion Cotillard) semble border – line oui bi-polaire ou hystérique. Sensuelle, exaltée, extrême. Cela dérange. On la considère comme folle. Elle fait peur à sa mère (Brigitte Roüan) qui la menace de l’interner et finalement la marie à José (Alex Brendemühl), un employé agricole catalan. Il a de l’avenir : il veut devenir maçon. Gabrielle ne l’aime pas et lui dit. Alors, José va voir des prostituées. Malheureuse auprès de ce mari, elle rêve que de « la chose principale » : vivre une passion dévorante et réciproque.

Projection de l’héroïne
Elle part soigner son « mal de pierre » (calculs rénaux ou colites néphrétiques) dans une station thermale en suisse et tombe sous le charme d’un bel officier, André Sauvage (LouisGarrel) qui a contracté une maladie lors de la guerre d’Indochine. Ses jours sont comptés. Ils fuiront ensemble, elle en est certaine.Une relation naît de cette rencontre puis, le spectateur apprend (par une pirouette improbable et maladroite) que ce n’était qu’une projection de l’héroïne, un fantasme. Un rêve. André et José semblent aux antipodes. Pourtant, tous deux ont connu l’horreur de la guerre (métaphore de la virilité). Pour l’un, il s’agissait d’un engagement militant, pour l’autre, d’un métier. Les deux hommes cristallisent deux conceptions de la relation de couple : l’un est dans la fulgurance, l’autre, dans la construction. C’est cette seconde, plus modeste, raisonnable et bien réelle, qui triomphera.

Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=n2D_0kTs4cE

Des maux pour le dire

Des maux pour le dire - Affiche du film La fille inconnueLa fille inconnue des frères Dardenne. Comme Rosetta (Emilie Dequenne) en quête d’un job, Samantha (Cécile de France), la coiffeuse qui ne voulait pas abandonner le gamin à vélo, Sandra (Marion Cotillard) qui sonnait chez ses collègues pour les persuader de renoncer à leur prime et lui permettre de garder son emploi, voici Jenny (Adèle Haenel), une jeune médecin. Encore un beau portrait de femme-courage.

Plus fort que ses émotions
Le cadavre d’une jeune black sans papiers qui avait sonné à son cabinet sans qu’elle lui ouvre a été retrouvé sur les quais de la Meuse. Faute d’avoir pu la sauver, Jenny va s’acharner à restituer son identité. Sa détermination va révéler les symptômes de la culpabilité et de la honte chez elle mais aussi chez les personnages qui gravitent autour de son cabinet, expiant d’eux-mêmes leur maux afin d’avancer et de prendre les bonnes décisions.
« Tu dois être plus fort que tes émotions si tu veux bien soigner », explique-t-elle à son stagiaire, bouleversé devant la crise d’épilepsie d’un enfant. Le scénario naturaliste met en exergue les liens qui se tissent peu à peu entre les gens. C’est un peu binaire. Au début un brin arrogante, Jenny devient bienveillante. Son humanité et sa douceur se dessinent peu à peu, son désir de justice, sa simplicité. Elle magnifie le quotidien. Toujours debout et droite pour s’adresser à ses patients, elle est, dans les derniers plans, assise.

Elle renonce à un poste dans une clinique privée pour ne pas quitter son quartier populaire. Entièrement dévouée à ses patients.
A l’écoute des corps, de la souffrance, des signes de somatisation de tous ceux qui sont mêlés au décès de l’inconnu (un pouls qui s’emballe, une crise de vomissement, une douleur à l’estomac…), jenny mène l’enquête.
Cette enquête, un peu piétinante, n’est finalement qu’un prétexte. L’essentiel n’est pas la mort de la victime que personne semble connaître que la réaction de chacun face à l’événement.

la bande-annonce: https://www.youtube.com/watch?v=yz7MUtFCYdA

Le temps qui reste

le temps qui reste - Affiche du film Juste la fin du monde Juste la fin du monde de Xavier Dolan. Je ne suis pas fan du théâtre filmé. Pourtant, le huis clos est ici bien assumé comme dans « Tom à la ferme », (le film est tiré de la pièce éponyme de Lagarce, écrite en 1990, légèrement datée). Un jeune écrivain, malade (Gaspard Ulliel) rentre dans sa famille après douze ans d’absence, pour annoncer sa fin prochaine. Et n’y arrive pas. Toutes les névroses familiales se rejouent, les frustrations de chacun s’exacerbent, les jalousies fratricides. Une dernière fois. Chacun parle beaucoup pour cacher l’essentiel. On retrouve la honte de soi et le déni, motifs qui infusent tous les films de Dolan.

Silence des non-dits
Lorsque l’hystérie se crie, le silence des non-dits est plus terrible encore. Dolan prend le temps de mettre en valeur ses personnages/acteurs. Toujours seuls ( la caméra va de l’un à l’autre, sans jamais filmer le groupe). Sous le doux regard de Louis, il y a le grand frère beauf (Vincent Cassel) comico – tragique, la mère toute fébrile et même folle tout court (Nathalie Baye, méconnaissable, peinturlurée), la belle – soeur effacée et sensible (Marion Cotillard) qui seule flaire le drame et la petite sœur bienveillante(Léa Seydoux).
Seul bémol : la langue de Lagarce faite de subtilités linguistiques n’est pas exactement restituée. Elle est un peu amoindrie, comme parasitée par le psychodrame. Les ajouts lexicaux vulgaires (surtout dans la bouche de Vincent Cassel) sont parfaitement inutiles. Et quid du monologue final de la pièce ?

Mon oncle d’Amérique n’a pas vieilli

Mon oncle d'Amérique

Je suis tombée par hasard sur Mon oncle d’Amérique d’Alain Resnais que j’avais vu à sa sortie en 1980 (je ne suis plus toute jeune). Dès l’amorce, une voix-off résume les caractéristiques des 3 personnages principaux déterminés par leurs milieux. Volontairement typés : l’un, Jean Legall (Roger Pierre, à contre-emploi) est Breton, issu d’une famille cultivée, l’autre, Jeannine Garnier, (magnifique Nicole Garcia) d’une famille d’ouvriers parisiens, l’autre, enfin, René Ragueneau (Gérard Depardieu), d’une famille de paysans du Maine et Loire.

Ce film choral et novateur pour l’époque, tant dans le thème que dans le style, mêle adroitement fiction et documentaire et met en exergue les travaux d’Henri Laborit (rats à l’appui) qui joue son propre rôle. Le réalisateur excelle dans la créativité et les mises en abyme, incorporant même des plans de films avec Danielle Darrieux, Jean Marais et Jean Gabin pour signifier l’identification des personnages à leurs idoles. En creux, on peut lire un portrait socio-culturel de la France au début des années 80.

Assurer la survie

Le découpage semble suivre les méandres du cerveau car du cerveau il en est beaucoup question. Extraits : « Remarquez que les plantes peuvent se maintenir en vie sans se déplacer. Elles puisent leur nourriture directement dans le sol, à l’endroit où elles se trouvent. Et grâce à l’énergie du soleil, elles transforment cette matière inanimée qui est dans le sol en leur propre matière vivante. (…) Les animaux, eux, donc l’homme qui est un animal, ne peuvent se maintenir en vie qu’en consommant cette énergie solaire qui a donc déjà été transformée par les plantes. Et ça, ça exige de se déplacer. Ils sont forcés d’agir à l’intérieur d’un espace(…) Pour se déplacer dans un espace, il faut un système nerveux. Et ce système nerveux va agir, va permettre d’agir, sur l’environnement et dans l’environnement. Et toujours pour la même raison : pour assurer la survie. Si l’action est efficace, il va en résulter une sensation de plaisir. Ainsi, une pulsion pousse les êtres vivants à maintenir leur équilibre biologique, leur structure vivante, à se maintenir en vie. Et cette pulsion va s’exprimer dans les quatre comportements de base : consommation qui correspond à un besoin fondamental : boire, manger, copuler ; un comportement de fuite ; un comportement de lutte ; un comportement d’inhibition.

Un être vivant est une mémoire qui agit

(…)Le premier cerveau déclenche les comportements de survie immédiate sans quoi l’animal ne pourrait pas survivre : Boire, manger pour maintenir sa structure, et copuler pour se reproduire. Et puis, dès qu’on arrive aux mammifères, un second cerveau s’ajoute au premier. « Et d’habitude on dit, avec MacLean que c’est le cerveau de l’affectivité. Je préfère dire que c’est le cerveau de la mémoire. Sans mémoire de ce qui est agréable, de ce qui est désagréable, il n’est pas question d’être heureux, triste, angoissé ; il n’est pas question d’être en colère ou d’être amoureux. On pourrait presque dire qu’un être vivant est une mémoire qui agit.
Enfin, un troisième cerveau s’ajoute aux deux autres : c’est le cortex cérébral. Chez l’homme, il a pris un développement considérable. Il associe les voies nerveuses et qui ont gardé la trace des expériences passées ; il les associe d’une façon différente de celles où elles ont été impressionnées par l’environnement au moment même de l’expérience. C’est-à-dire qu’il va pouvoir créer, réaliser un processus imaginaire. Dans le cerveau de l’homme, ces trois cerveaux superposés existent toujours. Nos pulsions sont toujours celles très primitives du cerveau reptilien (le fameux crocodile désormais à la mode).
Ces trois étages du cerveau devront fonctionner ensemble. Et, pour ce faire, ils vont être reliés par des faisceaux : le faisceau de la récompense, celui de la punition (va déboucher sur la fuite et la lutte) et celui qui va aboutir à l’inhibition de l’action.. Par exemple, la caresse d’une mère à son enfant, la décoration qui va flatter le narcissisme d’un guerrier, les applaudissements qui vont accompagner la tirade d’un acteur, et bien tout cela libère des substances chimiques dans le faisceau de la récompense et aboutira au plaisir de celui qui en est l’objet.

(…) J’ai parlé de la mémoire. Mais ce qu’il faut savoir, c’est que, au début de l’existence, le cerveau est encore, disons, immature. Donc, dans les deux ou trois premières années de la vie d’un homme, l’expérience qu’il aura du milieu qui l’entoure sera indélébile et constituera quelque chose de considérable pour l’évolution de son comportement dans toute son existence. Et finalement, nous devons nous rendre compte que ce qui pénètre dans notre système nerveux depuis la naissance, et peut-être avant in utero, les stimulus qui vont pénétrer dans notre système nerveux nous viennent essentiellement des autres ; et que nous ne sommes que les autres. Quand nous mourons, c’est les autres que nous avons intériorisés dans notre système nerveux, qui nous ont construits, qui ont construit notre cerveau, qui l’ont rempli, qui vont mourir.

L’inconscient comme une mer profonde

Ainsi nos trois cerveaux sont là. Les deux premiers fonctionnent de façon inconsciente. Nous ne savons pas ce qu’ils nous font faire : pulsions, automatismes culturels. Et le troisième nous fournit un langage explicatif qui donne toujours une excuse, un alibi, au fonctionnement inconscient des deux premiers. Je crois qu’il faut se représenter l’inconscient comme une mer profonde et ce que nous appelons le conscient, comme l’écume qui naît, qui disparaît, renaît à la crête des vagues. C’est la partie très très superficielle de cet océan qui est écorché par le vent (…).

Cette situation dans laquelle un individu peut se trouver d’inhibition dans son action, si elle se prolonge, commande à toute la pathologie. Les perturbations biologiques qui l’accompagnent vont déchaîner aussi bien l’apparition de maladies infectieuses que tous les comportements de ce qu’on appelle les maladies mentales. Quand son agressivité ne peut plus s’exprimer sur les autres, elle peut encore s’exprimer sur lui-même de deux façons. Il somatisera. C’est-à-dire qu’il dirigera son agressivité sur son estomac ; il y fera un trou, un ulcère d’estomac. Sur son cœur et ses vaisseaux il fera une hypertension artérielle. Quelquefois même des lésions aiguës qui aboutissent aux maladies cardiaques brutales : des infarctus, des hémorragies cérébrales ; ou des urticaires ou des crises d’asthme. Il pourra aussi orienter son agressivité contre lui-même d’une façon encore plus efficace : il peut se suicider. Et, quand on ne peut pas être agressif envers les autres, on peut, par le suicide, être agressif encore par rapport à soi.

Un bric à brac de jugements de valeurs

(…) L’inconscient constitue un instrument redoutable non pas tellement par son contenu refoulé, refoulé parce que trop douloureux à exprimer, car il serait « puni » par la socioculture, mais, par tout ce qui est, au contraire, autorisé et quelquefois même « récompensé » par cette socioculture, et qui a été placé dans son cerveau depuis sa naissance. Il n’a pas conscience que c’est là, et pourtant c’est ce qui guide ses actes. C’est cet inconscient-là, qui n’est pas l’inconscient freudien, qui est le plus dangereux. En effet, ce qu’on appelle la personnalité d’un homme, d’un individu, se bâtit sur un bric-à-brac de jugement de valeurs, de préjugés, de lieux communs qu’il traîne et qui, à mesure que son âge avance, deviennent de plus en plus rigide et qui sont de moins en moins remis en question. Et quand une seule pierre de cet édifice est enlevée tout l’édifice s’écroule. Il découvre l’angoisse. Et cette angoisse ne reculera ni devant le meurtre pour l’individu, ni devant le génocide ou la guerre pour les groupes sociaux pour s’exprimer..
(…) Tant que l’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent, tant qu’on n’aura pas dit que, jusqu’ici, ça a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chances qu’il y ait quelque chose qui change. ».
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Fiche N°1: le journal de bord

Parce que mes lecteurs sont en quête d’exercices de développement personnel, simples et ludiques, j’ai décidé de proposer tous les mois une fiche pratique. Evidemment, cela ne remplace pas une psychothérapie ou une analyse. Vous me connaissez !

journal de bord
Fiche N°1 : le journal de bord

Pour augmenter votre sentiment de bien-être et votre confiance en vous, voir le verre en moitié plein, notez tous les soirs, vos réussites personnelles et vos petits plaisirs même minuscules : recevoir un compliment, réussir un mouvement de gym, boucler un dossier, écouter son besoin de repos, admirer un beau paysage… quels talents cachés ou compétences révèlent-ils ? Quelles émotions ? Prenez le temps de vous relire régulièrement à voix haute en vous connectant à vos sensations.

Les plus motivés se lanceront dans un journal intime quotidien, un récit objectif en consignant tous les événements et sentiments. L’idée est de transformer les expériences négatives, « les ratages » en se demandant « Quel est le message caché derrière mes déconvenues ? »« qu’ai-je appris sur moi ? », « que diriez-vous à l’enfant qui est en vous pour le consoler ? ». Analysez ce qui était de l’ordre du possible et de l’impossible Et si cet échec était nécessaire à la prochaine réussite ? Bref, alchimisez les pépins en pépites.

Vous pouvez aussi vous écrire une lettre,si, si, comme le préconise par exemple Kristin Neff, psychologue américaine, et pratiquer « l’auto compassion », c’est-à-dire la bienveillance envers vous-même. Vous imaginez pour cela que vous êtes votre meilleur ami et que vous le réconfortez. Une manière d’adoucir le regard que l’on porte sur soi-même. Evoquez les qualités que vous lui reconnaissez, à travers des exemples concrets, les réussites, les compétences et écrivez les en gras. N’hésitez pas à lui proposer de les relire lorsqu’il doutera de lui- même. Réfléchissez aux causes de son déficit de confiance et à la manière d’y remédier.

A ceux qui croient ne pas avoir de conscience corporelle, je conseille d’écrire un « journal du corps » comme l’a si brillamment fait Daniel Pennac. Vous pouvez même être ce corps, parler à sa place. Laissez-le vous raconter ses besoins (les plus élémentaires, triviaux, tabous), ses désirs, ses souffrances, écoutez ses mouvements, ses sécrétions, ses bruits et décelez comme il est agréables de nourrir ce corps de sensations, au-delà des petits bobos, de le débarrassez de ses complexes.
Et si lors de vos consultations avec votre thérapeute, vous utilisiez vos écrits comme le fil rouge de la séance ?

A la lisière de la folie ordinaire

La folie ordinaire du roman l'amour et les forêts. jpgDans son roman (un peu) fourre-tout, entre conte, poésie, thriller, ultra référencé, « l’amour et les forêts », Eric Reinardt brosse avec justesse le portrait d’une femme en proie à la perversion de son mari.

Bénédicte Ombredanne, elle a un nom de tragédienne, prof de français agrégée, vit à Metz avec son mari et ses deux enfants. Elle contacte Eric Reinhardt (himself) afin de le féliciter pour son livre Cendrillon. Ils se rencontrent, à Paris, deux fois. Au Nemours, à côté de la Comédie Française ( !). Mariée à un cadre bancaire violent et complexé, elle confie à l’auteur le harcèlement dont elle est victime. De loin en loin, Eric Reinardt va suivre sa trajectoire de femme.

En clivage

Elle prend un amant, via Meetic, le temps d’une journée romantique (ou est-ce un fantasme pour échapper au quotidien ? ) « Elle était fière ce soir-là, les mains sur le volant, ailée et palpitante, de connaître enfin ce sentiment, d’apercevoir soudain la vraie fracture qui ordonnait le monde, et de se dire qu’elle figurait, chanceuse, parmi ceux, invisibles à l’œil nu, qui connaissent les vertiges d’une passion. » Mais refuse de prolonger ce bonheur. Par convention ? Prise dans l’engrenage de la relation toxique ?
Elle finit par avouer l’adultère « l’instant où elle avait amorcé ses aveux avait ouvert un territoire où elle s’était élancée à corps perdu avec une joyeuse sauvagerie, comme si au bout de cette ligne droite, elle savait qu’elle accéderait à une aurore pleine d’évidence, rose et légère, qui la verrait prendre ses affaires et ses enfants, sortir de sa maison et partir rejoindre Christian, affranchie, purifiée ».
En clivage « traumatisée par la violence qu’elle avait déployé, Bénédicte Ombredamme se sentait coupée de sa propre personne comme du monde extérieur », elle « se remit d’elle-même dans la routine familiale », elle vivra dans le souvenir de sa rencontre telle une Emma Bovary. Elle y songe « comme à une île sublime et odorante, charnelle, sonore, dont les splendeurs s’intensifiaient à mesure que les jours s’écoulaient, et que s’amenuisait la possibilité qu’elle puisse jamais les retrouver ».

Se restructurer par l’écriture

Ce n’est pas un roman sur les pervers narcissiques mais leur impitoyable mécanique est adroitement décrite « sa production plaintive et acharnée, inflationniste, infatigable, pendant des heures, pendant des heures, comme s’il voulait asphyxier son cerveau, le priver de toute lumière, l’amener à expulser la perle de son secret, par épuisement ». L’héroïne vit un enfer et se tait. Elle est humiliée dans sa condition de femme même « toi, tu n’es pas une femme, Bénédicte, je ne sais pas ce que tu es mais tu n’es pas une femme ». Cet homme a sur elle une emprise absolue. « il était parvenu à la rendre à ce point dépendante affectivement, de sa personne, qu’il pouvait par son comportement, de la manière la plus primaire, agir sur la psychologie et sur l’état mental et donc physique de Bénédicte, exactement comme s’il appuyait sur les boutons d’un tableau de bord incrusté dans sa poitrine ».
Bénédicte fait une tentative de suicide et se retrouve dans une maison de repos. Elle se restructure par l’écriture « en même temps qu’elle retrouvait la valeur essentielle d’une simple feuille de papier, la rayonnante valeur de sa personne se laissait de nouveau percevoir, sa saveur, ce par quoi elle se définissait comme un être distinct des autres, unique, indicible, estimable, au fond d’elle-même ». Elle s’attache aux « résidents de Sainte Blandine, de grands enfants qui assumaient gourmands et concentrés, méticuleux, très émouvants, leur processus de régression ». Au-delà de la persona, « tous avaient fait voler cette intime hypocrisie de soi en éclats, ils avaient eu le courage de se faire, de se laisser exploser de l’intérieur, de se mettre à nu face à eux – même ».

Somatisation à 100%

L’auteur apprend par hasard la mort de Bénédicte. Comme un enquêteur, il décide de provoquer un rendez-vous avec Marie-Claire, sa jumelle, qui focalise un temps le récit. S’ensuit, en creux, un deuxième portrait de femme.
Marie-Claire entretient avec sa sœur un rapport fusionnel (elle dit « ma jumelle ») en parlant d’elle. Elle est une figure maternante « vers la fin, à l’hôpital, elle m’a dit : c’est toi qui souffrira le plus quand je serai partie. Logique : je n’avais pas d’enfants, je n’avais qu’elle » qui reconnaît l’importance du contact physique dont sa Bénédicte a sans doute manqué « c’est un besoin d’être touché, un besoin vital. J’ai vu des femmes s’écrouler après un massage. Je leur masse longuement le corps, je sens qu’il se passe quelque chose de fort et juste après je les vois qui s’écroulent (…) comme si mes mains avaient fait remonter dans leur mémoire le souvenir qu’elles possédaient un corps et que sentir son corps est essentiel, que c’est dans le fond la plus belle chose qui soit ».
Elle évoque le caractère de sa sœur « Pour déjouer ses frayeurs, elle travaillait beaucoup » (…) Bénédicte avait besoin, pour vivre, d’être dépendante affectivement, moyennant quoi elle pouvait trouver la force d’être seule, voire solitaire, sauvage, au quotidien ». Caractère certainement corrélé à ses échecs sentimentaux à répétition. Elle décrit le cancer généralisé qui l’a tué « Bénédicte a toujours été en bonne santé, mais depuis qu’elle était mariée avec cet hommes, elle n’arrêtait pas d’enchaîner les maladies (…) La dureté de ce que ma jumelle devait supporter de son mari la faisait somatiser par des maladies graves (…) Son mari était dans le déni complet. Il disait que c’était de la pure comédie ». Un roman qui se pénètre (et se traverse) comme une forêt (pas vierge du tout).